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LE ROI JEAN.

HUBERT.

— Scrupules malséants ! N’ayez pas peur, faites.

Les exécuteurs sortent.

— Jeune gars, venez ici ; j’ai à vous parler.

Entre Arthur.
ARTHUR.

— Bonjour, Hubert.

HUBERT.

Bonjour, petit prince.

ARTHUR.

— Aussi petit prince que possible, ayant tant de titres — pour être un grand prince… Vous êtes triste.

HUBERT.

— En effet, j’ai été plus gai.

ARTHUR.

Dieu me pardonne ! — Personne, il me semble, ne devrait être triste que moi. — Pourtant je me souviens, quand j’étais en France, — il y avait de jeunes gentilshommes qui voulaient être tristes comme la nuit, — simplement par affectation. Foi de chrétien ! — si j’étais hors de prison à garder les moutons, — je serais aussi gai que le jour serait long ; — et je le serais même ici, si je ne soupçonnais pas — que mon oncle me veut encore du mal. — Il a peur de moi, et moi de lui. — Est-ce ma faute si je suis fils de Geoffroy ? — Non, vraiment, non ; et plût au ciel — que je fusse votre fils, pourvu que je fusse aimé de vous, Hubert.

HUBERT, à part.

— Si je lui parle, avec son innocent babil, — il va réveiller ma pitié, tout enterrée qu’elle est. — Donc, soyons brusque, et dépêchons.

ARTHUR.

— Êtes-vous malade, Hubert ? Vous êtes pâle aujour-