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SCÈNE IV.
accès me passera ; il ne me dure jamais plus de vingt secondes.
PREMIER ASSASSIN.

Comment te sens-tu maintenant ?

DEUXIÈME ASSASSIN.

Il y a encore en moi une certaine lie de conscience.

PREMIER ASSASSIN.

Songe à notre récompense quand l’action sera faite.

DEUXIÈME ASSASSIN.

Allons ! il meurt ! J’avais oublié la récompense.

PREMIER ASSASSIN.

Où est ta conscience maintenant ?

DEUXIÈME ASSASSIN.

Dans la bourse du duc de Glocester.

PREMIER ASSASSIN.

Dès qu’il ouvre sa bourse pour nous donner notre récompense, ta conscience s’envole.

DEUXIÈME ASSASSIN.

N’importe : qu’elle s’en aille ! Elle a peu ou point de chance de trouver un gîte.

PREMIER ASSASSIN.

Et si elle te revient ?

DEUXIÈME ASSASSIN.

Je ne veux plus me mêler d’elle. Elle est chose trop dangereuse : elle fait d’un homme un couard. Un homme ne peut voler qu’elle ne l’accuse ; un homme ne peut jurer qu’elle ne l’arrête ; un homme ne peut coucher avec la femme de son voisin qu’elle ne le dénonce. C’est un esprit à la face rouge de honte, qui se mutine dans le cœur de l’homme, et qui l’obstrue partout d’obstacles. Elle m’a fait une fois restituer une bourse pleine d’or que j’avais trouvée par hasard. Elle ruine quiconque la garde ; elle a été chassée des villes et des cités comme un être dangereux ; et tout homme qui entend vivre à l’aise