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RICHARD III.
Dieu ! — celui qui bâtit son espérance dans l’air de tes doux yeux — vit comme un matelot ivre au haut d’un mât, — toujours près d’être précipité par chaque secousse — dans les entrailles fatales de l’abîme.
LOVEL.

— Allons ! allons ! dépêchez. Cela ne sert à rien de s’exclamer.

HASTINGS.

— Ô sanguinaire Richard ! Misérable Angleterre ! — Je te prédis les temps les plus terribles — que le siècle le plus malheureux ait jamais vus ! — Allons, menez-moi au billot et portez-lui ma tête. — J’en vois sourire à ma chute qui bientôt seront morts.

Ils sortent.

SCÈNE XIII.
[Londres. Les remparts de la Tour.]
Entrent Richard et Buckingham, couverts d’armures toutes rouillées, et dans un étonnant désordre.
RICHARD.

— Allons ! cousin, peux-tu ainsi trembler et changer de couleur, — étouffer ta respiration au milieu d’un mot, — recommencer ensuite, puis t’arrêter encore, — comme si tu étais égaré, et fou de terreur ?

RUCKINGHAM.

— Peuh ! je sais contrefaire le plus profond tragédien, — parler, regarder en arrière, épier de tous côtés, — frissonner et tressaillir au mouvement d’un fétu — en affectant une inquiétude profonde : les airs de spectre — sont à mon service, comme les sourires forcés : — ils sont également prêts à faire leur office, — à toute