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RICHARD III.

RICHARD.

— Il n’est nul besoin, milord, d’une telle apologie. — C’est moi bien plutôt qui vous supplie de me pardonner, — si, dans mon zèle pour le service de mon Dieu, — j’ai négligé la visite de mes amis. — Mais laissons cela. Quel est le bon plaisir de votre grâce ?

BUCKINGHAM.

— C’en est un, je l’espère, qui plaira à Dieu, là-haut, — et à tous les hommes de bien de cette île sans chef.

RICHARD.

— Je soupçonne que j’aurai commis quelque offense — qui aura déplu à la cité, — et que vous venez pour me reprocher mon erreur.

BUCKINGHAM.

— Vous l’avez dit, milord. Dieu veuille que votre grâce — daigne réparer sa faute, sur nos instances !

RICHARD.

— À quoi bon, sans cela, respirer sur une terre chrétienne ?

BUCKINGHAM.

— Sachez donc que votre faute est d’abdiquer — le siége suprême, le trône majestueux, — l’office couronné de vos ancêtres, — la situation due à votre fortune et à votre naissance, — la gloire héréditaire de votre royale maison, — au profit du vil rejeton d’une tige flétrie. — Oui, pendant le doux sommeil de vos pensées — que nous réveillons ici pour le bien de notre patrie, — cette noble île déplore ses membres mutilés, — sa face défigurée par les cicatrices de l’infamie, — sa royale tige greffée d’ignobles plantes, — et presque tout entière plongée dans le gouffre béant — de la noire indifférence et de l’oubli profond. — Pour la sauver, nous vous sollicitons cordialement, — gracieux prince, de prendre en personne — le gouvernement de cette monarchie. Il est