Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/44

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» Lord Hastings s’étant arrêté un moment pour s’entretenir avec un prêtre qu’il avait rencontré dans Tower-Street, sir Thomas interrompit sa prière, en lui disant brusquement : « Allons, milord, venez donc : pourquoi causez-vous si longtemps avec ce prêtre ? Vous n’avez pas encore besoin d’un prêtre. » Et il lui riait au visage, comme pour lui dire : Vous en aurez besoin bientôt. L’autre se doutait peu de ce qu’entendait par là son compagnon ; mais ceux qui entendirent ces paroles s’en souvinrent bien avant la nuit suivante. Donc, le candide lord Hastings se méfiait fort peu ; jamais il n’avait été plus gai, et jamais, ce qui est souvent un signe de changement, il n’avait cru son existence plus assurée. On aura peine à croire quelle folle confiance avait cet homme si près de la mort. Sur le quai même de la Tour, à une portée de pierre de l’endroit où sa tête devait si tôt tomber, ayant rencontré un poursuivant d’armes de sa maison, nommé Hastings, il lui rappela une précédente rencontre qu’ils avaient eue tous deux au même endroit, dans un temps où lui, lord Hastings, avait été accusé auprès du roi par lord Rivers, le frère de la reine, et avait subi une disgrâce momentanée. Comme il se retrouvait à la même place avec le même poursuivant, il eut grand plaisir à causer avec lui de la crise qu’il avait si bien traversée : — Ah ! Hastings, lui dit-il, te souviens-tu du jour où je t’ai rencontré ici pour la première fois ? J’avais le cœur tellement accablé !

— Oui, milord, répondit l’autre, je m’en souviens bien. Dieu soit loué ! ils n’ont rien gagné à cela et vous n’y avez rien perdu.

— Tu dirais cela d’autant mieux, si tu savais, comme moi, ce qui va arriver avant peu.

» La nouvelle à laquelle il faisait allusion était que le comte de Rivers, lord Richard et sir Thomas Waughan