Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/49

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daine, ils avaient été forcés, lui et le duc de Buckingham, de revêtir pour leur défense la première armure qu’ils avaient eue sous la main. Mais, grâce à Dieu, le mal était retombé sur ceux qui voulaient le commettre. C’est ainsi que le prince pria ses auditeurs de rapporter les faits. Tous répondirent favorablement, comme si nul n’eût eu des doutes sur une explication à laquelle, en réalité, nul ne croyait. »

La mort de Hastings frappa de terreur le Parlement. Désormais sûr de l’appui des chambres, Richard, ce malfaiteur de génie, entreprit une tâche plus difficile encore : c’était d’obtenir le consentement de la nation. Il avait cette idée grandement horrible de faire toute l’Angleterre sa complice. Pour réaliser cette idée, il s’adressa au clergé. La presse n’existant pas encore, la chaire était l’unique moyen de propagande. Le Protecteur l’employa à son projet. Chose monstrueuse ! il trouva des prêtres pour prêcher le crime. À son instigation, le docteur Ralph Shaw, curé de Saint-Paul de Londres, fit, devant toute la cour, un sermon où il démontrait de la façon la plus édifiante que les enfants d’Édouard IV étaient bâtards, et concluait à la nécessité de détrôner le jeune roi. Grande fut la surprise causée dans Londres par cette étrange homélie. Le Protecteur, inquiet pour ses desseins, envoya vite à l’Hôtel de ville l’orateur le plus disert de l’époque, le duc de Buckingham. Celui-ci harangua la Commune, et se mit en frais d’éloquence pour prouver que la couronne revenait de droit au Protecteur, seul héritier légitime. Thomas Morus, dans son histoire de Richard III, que nous avons déjà citée, a raconté en détail la curieuse séance qui eut lieu dans la grand’salle du Guildhall, le mardi 24 juin 1483 :

« Le duc de Buckingham avait espéré que le peuple, travaillé d’avance par le maire, s’empresserait, cette pro-