Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/96

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quences, et par son accomplissement — assurer le succès, si ce coup — pouvait être tout et la fin de tout, ici-bas, — rien qu’ici-bas, sur le sable mouvant de ce monde, — je me jetterais tête baissée dans la vie à venir. Mais ces actes-là — trouvent toujours ici-bas leur sentence. Les leçons sanglantes — que nous enseignons reviennent, une fois apprises, — châtier le précepteur. La justice à la main impartiale — présente le calice empoisonné par nous — à nos propres lèvres… Il est ici sous une double sauvegarde : — d’abord, je suis son parent et son sujet, — deux raisons puissantes contre l’action ; ensuite, je suis son hôte : — à ce titre, je devrais fermer la porte au meurtrier, — et non porter moi-même le couteau. Et puis, ce Duncan — a usé si doucement de son pouvoir, il a été — si pur dans ses hautes fonctions, que ses vertus — emboucheraient la trompette des anges pour dénoncer — le crime damné qui l’aurait fait disparaître ; — et la pitié, pareille à un nouveau-né tout nu, — chevauchant sur l’ouragan, ou à un chérubin céleste — qui monte les coursiers invisibles de l’air, — soufflerait l’horrible action dans les yeux de tous, — jusqu’à noyer le vent dans un déluge de larmes… Je n’ai, — pour presser les flancs de ma volonté, que l’éperon — d’une ambition qui prend trop d’élan — et se laisse désarçonner… Eh bien ! quoi de nouveau ?
Entre Lady Macbeth.
LADY MACBETH.

— Il a presque soupé : pourquoi avez-vous quitté la salle ?

MACBETH.

— M’a-t-il demandé ?

LADY MACBETH.

Ne le savez-vous pas ?