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INTRODUCTION.

II

Au commencement du douzième siècle, un certain Walter Mapes, archidiacre d’Oxford, clerc très-savant et très-curieux de vieilles chroniques, fit un voyage en Armorique, dans l’espoir d’y trouver quelque document nouveau sur l’histoire de sa patrie. Il parcourut la péninsule avec un zèle infatigable, interrogeant les habitants, fouillant les archives des villes, remuant les bibliothèques des monastères. Un jour enfin il découvrit dans je ne sais quel cloître un manuscrit en langue bretonne qui avait tous les signes de la plus haute antiquité. Ce manuscrit comblait une lacune considérable dans les annales d’Albion : il révélait les faits et gestes d’une foule de rois qui avaient régné en Grande-Bretagne depuis l’incendie de Troie jusqu’au septième siècle de notre ère. Jusqu’alors les chroniqueurs les mieux informés, tels que dom Gildas et dom Bède, avaient daté l’histoire du peuple breton des commentaires classiques de César, — aucun monument ne les ayant renseignés sur les temps antérieurs à l’invasion des Romains. Désormais, grâce au manuscrit découvert par Walter, tout ce passé inconnu était tiré de l’oubli ; les origines de la grande nation britannique étaient pour toujours exhumées de la poussière séculaire qui les couvrait. Je renonce avons peindre l’émotion du bon archidiacre en feuilletant ce rare palimpseste. La joie de Colomb apercevant l’Amérique rêvée ne fut pas plus grande que celle de Walter voyant ressusciter tout à coup le monde celtique évanoui.

Bientôt revenu en Angleterre, l’archidiacre d’Oxford montra le précieux manuscrit à son confrère, le docte Geoffroy Arthur, archidiacre de Monmouth, elle pria d’en faire la traduction en latin. Gallois de naissance et latiniste par profession, Arthur avait toutes les qualités requises pour