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ŒUVRES EN PROSE

Voyons ce qu’a été la religion catholique romaine, personne ne connaît bien les temps primitifs de la religion chrétienne pendant les trois premiers siècles de son origine. Deux grandes Églises, la grecque et la romaine, se partageaient les croyances des hommes. Elles se combattirent pendant longtemps, elles firent une grande dépense de paroles, elles versèrent le sang avec la même profusion.

Cela ne produisit aucun bien, comme vous pouvez le supposer. Néanmoins chaque parti prétendait soutenir les intérêts de Dieu, et s’attendait à être récompensé par lui. Si ces gens-là avaient regardé plus loin que le bout de leur nez, ils auraient compris que se battre avec des hommes, les massacrer, les maudire, les haïr était, certes, la pire manière de se faire bien voir d’un être qui, selon l’opinion universelle, se complaît surtout dans les œuvres d’amour et de charité.

À la fin pourtant, ces deux religions se séparèrent entièrement, et les papes régnèrent comme des rois et des évêques à Rome, en Italie. L’Inquisition fut établie et dans le cours d’un an 30,000 personnes furent brûlées en Espagne et en Italie parce qu’elles professaient des opinions autres que celles du Pape et des prêtres. L’exemple le plus révoltant de barbarie fut donné en France par le clergé catholique romain sur l’ordre du Pape. Les moines fanatiques de ce pays massacrèrent de sang-froid, en une nuit, 80,000 protestants ; cela se fit sous le couvert de l’autorité du pape, et il n’y eut qu’un seul évêque catholique romain qui eut assez de