Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

homme puisse obtenir directement par son travail ; c’est du travail d’autrui qu’il lui faut attendre la plus grande partie de toutes ces jouissances, ainsi il sera riche ou pauvre, selon la quantité de travail qu’il pourra commander ou qu’il sera en état d’acheter.

Ainsi, la valeur d’une denrée quelconque pour celui qui la possède et qui n’entend pas en user ou la consommer lui-même, mais qui a intention de l’échanger pour autre chose, est égale à la quantité de travail que cette denrée le met en état d’acheter ou de commander. Le travail est donc la mesure réelle de la valeur échangeable de toute marchandise[1].

Le prix réel de chaque chose, ce que chaque chose coûte réellement à celui qui veut se la procurer, c’est le travail et la peine qu’il doit s’imposer pour l’obtenir. Ce que chaque chose vaut réellement pour celui qui l’a acquise, et qui cherche à en disposer ou à l’échanger pour quelque autre objet, c’est la peine et l’embarras que la possession de cette chose peut lui épargner et qu’elle lui permet d’imposer à d’autres personnes. Ce qu’on achète avec de l’argent ou des marchandises est acheté par du travail, aussi bien que ce que nous acquérons à la sueur de notre front. Cet argent et ces marchandises nous épar-

  1. Le travail, ou le produit du travail consacré à la création ou à l’acquisition des marchandises, n’est pas cependant, quoique la plus importante de beaucoup, la seule source de la valeur, et sitôt qu’une marchandise ou un produit peut constituer la propriété ou la jouissance d’une ou de plusieurs personnes exclusivement, il est susceptible de valeur échangeable ; c’est-à-dire qu’alors même qu’il n’aurait rien coûté à ses possesseurs, il peut se trouver d’autres personnes disposées à donner en échange une partie de leur travail ou des produits de leur travail. Ceci résulte de ce phénomène, que la marchandise n’existe qu’en un degré d’abondance limité, et conséquemment, sous l’influence de faits qui permettent de la monopoliser. Un individu qui possède une chute d’eau dans sa propriété, peut quelquefois en retirer un revenu considérable, et un individu qui a rencontré un antique joyau, pourra probablement le vendre à un très-haut prix. Le nombre des chutes d’eau et des pierres antiques est limité et ne peut être accru ; on ne peut appliquer à leur production ni travail ni capital, et c’est pourquoi, quoique primitivement la chute d’eau n’ait rien coûté, elle peut acquérir une valeur locative égale à celle du travail qu’elle épargnera à ceux qui l’emploieront à transmettre le mouvement aux machines ou à produire tout autre effet désiré : mais la valeur du joyau ne sera pas réglée de même ; car, la demande qu’il excitera dépendant entièrement des caprices du goût et de la mode, ainsi que de la fortune de ceux qui désirent de telles curiosités, cette valeur oscillera entre des extrêmes très-éloignés. Mac Culloch.