Page:Sophocle, trad. Leconte de Lisle, 1877.djvu/286

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.

dans l’erreur, il s’en guérit au lieu d’y persister. L’opiniâtreté est une preuve d’ineptie. Pardonne à un mort, ne frappe pas un cadavre. Quelle vaillance y a-t-il à tuer un mort ? Je te conseille par bienveillance pour toi. Il est très-doux d’écouter un bon conseiller, quand il enseigne ce qui est utile.

KRÉÔN.

Ô vieillards, tous comme des archers dans le but, vous envoyez vos flèches contre moi. Je n’ai point été épargné par les divinateurs ; j’ai été trahi et vendu depuis longtemps par mes proches. Faites des gains, acquérez l’ambre jaune des Sardes et l’or indien, à votre gré ; mais vous ne mettrez pas celui-ci dans le tombeau. Quand même les aigles de Zeus porteraient jusqu’à son thrône les lambeaux de cette pâture, je ne permettrai pas de l’ensevelir, car je ne crains pas cette souillure, sachant que les forces d’aucun mortel ne suffisent pour qu’il puisse souiller les Dieux. Ô vieillard Teirésias, les plus habiles des hommes tombent d’une chute honteuse, quand, par le désir du gain, ils prononcent avec emphase des paroles honteuses.

TEIRÉSIAS.

Hélas ! qui sait, quel homme songe…

KRÉÔN.

Qu’est-ce ? Que dis-tu par ces paroles banales ?

TEIRÉSIAS.

Combien la prudence est au-dessus de toutes les richesses !