Page:Sophocle, trad. Leconte de Lisle, 1877.djvu/46

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roulait contre terre, puis se relevait hurlant, et tout autour les rochers en mugissaient, et le faîte des monts Lokriens et les promontoires d’Euboia. Après avoir épuisé ses forces à se tordre contre terre et à pousser tant de hurlements, détestant ses noces funestes avec toi, malheureuse, et l’alliance d’Oineus, d’où était sorti le malheur de sa vie, il détourna alors ses yeux égarés, et il me vit versant des larmes au milieu de la foule, et, m’ayant regardé, il m’appela : — Approche, ô mon enfant. Ne fuis pas mon mal, même s’il te fallait mourir en même temps que moi qui meurs. Enlève-moi, emporte-moi d’ici et cache-moi là où nul des mortels ne puisse me voir. Si tu as pitié de moi, emporte-moi très-promptement de cette île, afin que je n’y meure pas. — D’après cet ordre, nous le mîmes dans une nef, et nous l’avons conduit ici avec beaucoup de peine, convulsif et hurlant. Vous le verrez bientôt, vivant ou mort. Tu as fait cela contre mon père, mère, l’ayant médité et accompli. Puissent Dikè vengeresse et Érinnys te châtier ! Je le souhaite, s’il m’est permis de le souhaiter. Mais toi-même m’en as donné le droit en tuant le plus grand des hommes qui sont sur la terre, et tel que tu n’en verras jamais de semblable.

LE CHŒUR.

Pourquoi sors-tu en silence ? Ne t’aperçois-tu pas qu’en te taisant tu donnes raison à l’accusateur ?

HYLLOS.

Laissez-la sortir. Puisse un vent propice l’éloigner bien loin de mes yeux ! Qu’est-il besoin qu’elle s’honore du nom de mère, elle qui n’agit point comme une mère