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au bord du lac.

averti qu’il existait un lien de parenté entre le cadavre et les deux assistants, car l’argent leur avait manqué pour acheter des habits de deuil.


§ 2.


Abandonnés à eux-mêmes, les deux frères ne tardèrent pas à suivre deux routes différentes. François, que la mort de sa mère avait troublé, parce que la disparition de ceux qui nous soignent et nous aiment a quelque chose de saisissant même pour les cœurs les plus frivoles, ne trouva d’autre moyen d’échapper à la tristesse que les distractions bruyantes. Le lendemain du jour où il avait descendu sa mère dans la fosse, il était au Tanevat avec les garçons de son âge, glissant sur les flaques d’eau glacée qu’entrecoupaient les clairières. Frédéric comprit différemment ses devoirs ; une fois sa première douleur apaisée, il songea à suivre les conseils de sa mère en travaillant avec courage. Il retourna à la fabrique les yeux rouges, le front pâle et le cœur triste, mais résolu. En passant près de lui dans la journée, M. Kartmann s’arrêta :

— Vous avez été plusieurs jours sans venir, lui dit-il sévèrement ; voudriez-vous renoncer à vos habitudes d’exactitude ?

— Je soignais ma mère, monsieur.

— Elle est donc mieux maintenant ?

— Elle est morte ! répondit Frédéric en pleurant.