Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/27

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encore l’idée principale, qui eût dû être : « Madame de Chasteller répond ! » Il était effrayé de la sévérité du langage et du ton de persuasion profonde avec lequel elle l’exhortait à ne plus parler de sentiments de cette nature, tout en lui intimant l’ordre, au nom de l’honneur, au nom de ce que les honnêtes gens réputent le plus sacré dans leurs relations réciproques, d’abandonner les idées singulières avec lesquelles il avait sans doute voulu sonder son cœur (d’elle, madame de Chasteller) avant de s’abandonner à une folie qui, dans leur position réciproque, et surtout avec sa façon de penser à elle, était une aberration, elle osait le dire, on ne peut plus difficile à comprendre.

« C’est un congé bien en forme, se dit Leuwen après avoir relu cette lettre terrible au moins cinq ou six fois. Je ne suis guère en état de faire une réponse quelconque, pensa-t-il ; cependant, le courrier de Paris passe demain matin à Darney, et si ma lettre n’est pas ce soir à la poste, madame de Chasteller ne la lira que dans quatre jours. »

Cette raison le décida. Là, au milieu du bois, avec un crayon qu’il se trouva par bonheur, et en appuyant sur le haut de son shako la troisième page de la lettre de madame de Chasteller qui était restée