Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/13

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regret, à quoi Lucien osa répondre en regardant avec l’expression du désir les jolies poses auxquelles madame Grandet s’abandonnait au milieu de sa douleur de perdre[1]. Lucien, tout mort qu’il était, se donnait beaucoup de mouvement autour du billard et suivait les billes de madame Grandet avec l’anxiété du plus vif intérêt[2]. Il prit son parti avec une vivacité affectée et assez plaisante dans une chicane mal fondée qu’elle fit au préfet hâbleur qui était resté seul avec elle et prétendait gagner.

Bientôt madame Grandet perdit la poule, mais Lucien avait fait de tels progrès dans son esprit qu’elle jugea à propos de lui adresser une petite dissertation géométrique et profonde sur les angles que forment les billes d’ivoire en frappant les bandes du billard. Lucien fit des objections.

— Ah ! vous êtes élève de l’École polytechnique, mais vous êtes un élève chassé, et sans doute vous n’êtes pas très fort en géométrie.

Lucien invoqua des expériences ; on mesura des distances sur le billard ; madame Grandet eut l’occasion d’étaler

  1. Alléger le style.
  2. Vérité : — Réellement elle montrait un pied et un bas de jambe charmants, des hanches admirables.