Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/18

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lui parla des savantes découvertes faites par les Allemands : Homère n’a peut-être fait qu’un épisode de la collection de chansons si célèbre sous son nom et dont la savante ordonnance, fruit du hasard, est si admirée par le pédant. Madame Grandet parla très bien de l’école d’Alexandrie. On faisait tout à fait cercle autour d’elle. On en vint aux antiquités chrétiennes, madame Grandet prit un air sérieux, les coins de sa bouche s’abaissèrent.

Cet Allemand nouvellement présenté ne se mit-il pas à attaquer la messe, en parlant à une bourgeoise de la cour de Louis-Philippe ? (Ces Allemands sont les rois de l’inconvenance.)

— La messe n’était au Ve siècle, disait-il, qu’une réunion où l’on rompait le pain en commun, en mémoire de Jésus-Christ. C’était une sorte de thé de gens bien pensants. Il n’entrait dans l’idée de personne que l’on fit actuellement quelque chose de sérieux, de différent le moins du monde d’une action ordinaire, et encore moins que l’on fit un miracle, le changement du pain et du vin dans le corps et le sang du Sauveur. Nous voyons peu à peu ce thé des premiers chrétiens augmenter d’importance, et la messe se former.

— Mais, grand Dieu ! où voyez-vous cela, monsieur ? disait madame Grandet