Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/28

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et non à se faire une position élevée. »

Et elle eut horreur de cette façon de penser vulgaire.

« Cela n’a point de nom. C’est un petit jeune homme, fils d’un banquier riche et qui s’est acquis la réputation d’homme d’esprit par sa méchante langue. M. Lucien est tout simplement un débutant dans la carrière où M. Grandet est si avancé, il n’a pas de nom, pas de parenté considérable et bien établie dans le monde. Il est hors de son pouvoir de rien ajouter à ma position. Toutes les fois que M. Leuwen sera invité aux Tuileries, je le serai aussi, et avant lui. Il n’a jamais été admis à l’honneur de danser avec les princesses[1]. »

Telles étaient les idées que madame Grandet cherchait à vérifier en regardant Lucien, pendant qu’il la croyait toute occupée de la faute de M. l’épicier Béranville et des moyens de l’en punir en lui ôtant la pratique de l’état-major de la garde nationale.

Madame Grandet se dit tout à coup, presque en riant, mouvement rare chez elle :

« S’il a pour moi cette passion que madame de Thémines lui prête, si généreusement je pense, il faut le rendre tout à fait

  1. Donner un style toujours un peu enflé à madame Grandet, même quand elle se parle.