Page:Stendhal - Vie de Napoléon.djvu/45

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mais je leur avais accordé une capitulation à El Arisch ; la condition était qu’ils retourneraient à Bagdad. Ils rompirent cette capitulation, se jetèrent dans Jaffa et je les pris d’assaut. Je ne pouvais les emmener prisonniers avec moi, car je manquais de pain, et ils étaient des diables trop dangereux pour les lâcher une seconde fois dans le désert. Il ne me resta donc d’autre moyen que de les tuer. »

Il est vrai, d’après les lois de la guerre, qu’un prisonnier qui a une fois manqué à sa parole, n’a plus droit à recevoir quartier[1], mais l’affreux droit du vainqueur n’a été que rarement exercé, et jamais, ce me semble, dans nos temps modernes, sur un aussi grand nombre d’hommes à la fois. Si les Français avaient refusé quartier dans la chaleur de l’assaut, personne ne les aurait blâmés : les tués avaient manqué à leur parole ; si le général vainqueur avait su qu’une grande partie de la garnison consistait en prisonniers renvoyés sur parole à El Arisch, très probablement il eût donné ordre de les passer au fil de l’épée. Je ne crois pas que l’histoire offre d’exemple d’une garnison épargnée au moment de l’assaut, et, ensuite, envoyée à la mort. Mais ce

  1. Martens : Lois des Nations, p. 291.