Page:Stendhal - Vie de Napoléon.djvu/79

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seuls firent connaître la peur à cette âme intrépide, un beau jour, le Tribunat ayant osé raisonner juste contre les projets de lois préparés par ses ministres, il chassa de ce corps tout ce qui valait quelque chose et, peu après, le supprima entièrement. Le Sénat, bien loin d’être conservateur, éprouvait des mutations perpétuelles et s’avilissait sans cesse, car Bonaparte ne voulait pas qu’aucune institution prît des racines dans l’opinion. Il fallait qu’un peuple très fin sentît au milieu des phrases de stabilité, de postérité, que rien n’était stable que son pouvoir, que rien n’était progressif, que son autorité. « Les Français, dit-il vers ce temps, sont indifférents à la liberté ; ils ne la comprennent ni ne l’aiment ; la vanité est leur seule passion, et l’égalité politique, qui permet à tous l’espérance d’arriver à toutes les places, est le seul droit politique dont ils fassent cas. »

Jamais rien de plus juste n’a été dit sur la nation française[1].


Sous l’empereur, la théorie faisait crier les Français : À la liberté, bien plus qu’ils n’en éprouvaient réellement le besoin.

  1. For me : Ce qui me montre la bêtise des Bourbons c’est que voulant un plaisir absolu, ils ne prennent pas cette route.