Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/109

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— Cela fait juste, exactement, quarante livres.

Ces dernières paroles, il les prononça péniblement en jetant un regard par-dessus son épaule, puis le moment d’après il ajouta comme un cri :

— D’Écosse.

La livre d’Écosse équivalant tout juste à un shelling d’Angleterre, la différence qui résultait de ce second mouvement était considérable ; je voyais en outre fort bien que toute cette histoire était un mensonge, improvisé dans un but qui m’intriguait.

Je ne fis aucun effort pour dissimuler le ton railleur de ma voix en lui disant :

— Songez donc, monsieur, des livres sterling, je crois.

— C’est ce que je disais, répondit mon oncle, livres sterling. Et si vous voulez bien sortir dehors une minute, rien que le temps de voir s’il fait bien noir, je vais les chercher, et je vous dirai de rentrer.

Je fis ce qu’il me demandait, souriant avec mépris à l’idée qu’il croirait m’avoir si facilement trompé.

Il faisait une nuit noire. Quelques étoiles à peine brillaient très bas à l’horizon, et pendant que je me tenais au dehors à côté de la porte, j’entendis comme un gémissement sourd, le souffle lointain du vent sur les collines.

Je me dis à part moi qu’il y avait quelques présages annonçant le tonnerre et un changement de temps, et je ne me doutais guère de l’importance que ce détail allait prendre pour moi avant que la soirée fût passée.

Quand mon oncle m’eut fait rentrer, il compta dans ma main trente-sept pièces d’or d’une guinée, le reste était dans sa main, en petite monnaie d’or et d’argent ; mais alors le cœur lui manqua, et il fourra cette monnaie dans sa poche.