Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/133

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un piège, et je lui répondis que mon oncle et moi, nous devions nous rendre chez un homme de loi.

— Oui, oui, me dit-il, il m’en a glissé quelques mots. Mais, comme vous voyez, le vaisseau est amarré au quai de la ville, et de là chez Rankeillor, il n’y a pas même la distance d’un jet de pierre.

Et soudain, se penchant vers moi, il me chuchota ces mots à l’oreille :

— Méfiez-vous du vieux renard, il médite quelque méfait. Montez à bord, pour que je puisse vous dire un mot en particulier.

Alors, passant son bras sous le mien, il reprit tout haut, en se dirigeant vers son vaisseau :

— Allons, venez, que puis-je vous apporter des Carolines ? Un ami de M. Balfour sera toujours obéi de grand cœur. Un ballot de tabac ? Un tissu indien fait avec des plumes ? Une peau de bête sauvage ? Une pipe de terre ? L’oiseau moqueur qui miaule comme pas un chat au monde ? L’oiseau cardinal, qui est rouge comme du sang ? Faites votre choix et dites-moi ce qui vous ferait plaisir.

À ce moment-là, nous étions près de la yole.

Il me montrait le chemin de la main.

Je ne songeais pas à me faire prier.

Je pensais (pauvre sot que j’étais) que je m’étais fait un bon ami, un protecteur, et j’étais enchanté de voir le vaisseau.

Aussitôt que nous eûmes pris nos places, la yole fut éloignée de l’appontement et commença à se mouvoir sur les eaux.

Quel plaisir me fit éprouver ce balancement inconnu ! Quelle fut ma surprise en me voyant à un niveau aussi bas, à l’aspect du rivage, à l’augmentation des proportions du brick à mesure que nous en approchions !