Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/174

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Mais je n’eus point à secourir Alan.

Le lutteur avait enfin lâché prise, et Alan faisant un bond en arrière pour reprendre sa distance, fondit sur les autres comme un taureau, en poussant des hurlements.

Ils se dispersèrent devant lui, s’évanouirent comme l’eau, tournant, courant, tombant les uns sur les autres dans leur précipitation.

L’épée brillait dans sa main comme le mercure et s’enfonçait ensuite dans la masse de nos ennemis, et à chaque éclair, j’entendais le cri d’un homme atteint.

Je pensais toujours que nous étions perdus, quand je reconnus que tous avaient fui.

Alan les pourchassait sur le pont comme un chien de berger pourchasse les moutons.

Mais à peine fut-il sorti qu’il revint. Il était aussi prudent que brave. Cependant, les marins continuaient à courir en criant comme s’il était encore sur leurs talons. Nous les entendîmes dégringoler l’un sur l’autre dans le gaillard d’avant, fermer et verrouiller l’écoutille au-dessus de leurs têtes.

La dunette avait l’air d’un abattoir. Il y avait dans l’intérieur trois morts ; un autre achevait d’agoniser sur le seuil. Alan et moi nous restions, sains et saufs, maîtres du terrain.

Il vint à moi, les bras ouverts :

— Venez dans mes bras, s’écria-t-il, en m’embrassant sur les deux joues et en m’étreignant, David, je vous aime comme un frère.

Ah ! s’exclama-t-il dans une sorte d’extase. Ne suis-je pas un rude combattant ?

En disant ces mots, il se tourna vers les quatre ennemis, plongea son épée tout entière dans le corps de chacun d’eux, et les traîna ainsi dehors l’un après l’autre.