Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/227

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de quinze livres sterling pour la première fois, et pour la récidive à être transporté aux colonies.

D’autre part il m’était bien difficile d’admettre qu’un instructeur religieux allât ainsi armé, et de m’expliquer ce qu’un aveugle pouvait faire d’un pistolet.

Je lui parlai de mon guide, car j’étais fier de ce que j’avais fait, et ma vanité l’emporta cette fois sur ma prudence.

À la mention des cinq shellings, il poussa un tel cri que je pris aussitôt le parti de ne lui rien dire des deux autres, et je fus heureux qu’il ne pût voir ma rougeur.

— Était-ce trop ? demandai-je d’une voix mal assurée.

— Trop ! s’écria-t-il, mais moi je vous guiderai jusqu’à Torosay pour une goutte de brandy. Et vous aurez le plaisir de ma société par-dessus le marché, moi qui suis un homme de quelque instruction.

Je lui dis que je ne voyais pas comment un aveugle pouvait servir de guide, mais à ces mots il éclata d’un rire bruyant, et me dit que son bâton valait les yeux d’un aigle.

— Dans l’île de Mull, tout au moins, reprit-il, où je connais chaque pierre, chaque buisson de bruyère, de mémoire. Voyez maintenant, dit-il en brandissant son bâton à droite et à gauche, comme pour en donner la preuve, là-bas, il y a un ruisseau d’eau courante, et à la source, il se trouve une toute petite colline, avec une pierre posée de champ sur le sommet, et c’est tout au pied de cette colline-là que passe la route de Torosay ; la route d’ici est une route charretière, et bien tassée, tandis qu’elle est gazonnée là où elle traverse la lande.

Je dus avouer qu’il avait raison sur tous les points, et je lui exprimai mon étonnement.