Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/97

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— Je l’avoue, monsieur, quand on m’a appris que j’avais des parents dans l’aisance, je me suis laissé aller à l’espoir qu’ils pourraient m’être de quelque aide dans la vie. Mais je ne suis point un mendiant ; je ne m’attends de votre part à aucune faveur et je n’en accepterais aucune qui ne serait pas absolument spontanée car, si pauvre que je paraisse, j’ai des amis, qui seront heureux de me venir en aide.

— Ta ! ta ! fit l’oncle Ebenezer, ne me jetez pas de la poudre aux yeux. Nous nous entendrons parfaitement ensemble. Et David, mon garçon, si vous avez fini votre assiette de soupe, je serais assez disposé à en prendre un peu.

Oui, reprit-il, dès qu’il se fut emparé de ma chaise et de ma cuiller, c’est une bonne et saine nourriture, une nourriture substantielle que la soupe.

Il se marmotta à lui-même une sorte de grâces et reprit.

— Votre père était très porté sur la nourriture, je crois, il mangeait volontiers, sans être un gros mangeur ; quant à moi, je n’ai jamais pu aller plus loin que les deux ou trois premières bouchées.

Il prit une gorgée de sa petite bière, ce qui sans doute le rappela aux devoirs de l’hospitalité, car ce qu’il me dit ensuite revient à ceci :

— Si vous vous sentez altéré, vous trouverez de l’eau derrière la porte.

À cela je ne répondis rien.

Je restai debout, raide sur mes deux jambes, et laissant tomber mon regard sur mon oncle, le cœur gonflé de colère.

Quant à lui, il continuait à manger, en homme que le temps presse, tout en jetant des coups d’œil furtifs tantôt sur mes souliers, tantôt sur mes bas faits à la maison.