Page:Stevenson - Le Mort vivant.djvu/210

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plus, que les meubles pussent, d’eux-mêmes, changer leur position. Et cependant, sans l’ombre d’un doute, il y avait quelque chose là ! Gédéon étendit ses mains, dans les ténèbres. Oui, il y avait quelque chose, quelque chose de grand, quelque chose de poli, quelque chose de froid ! « Que le ciel me pardonne ! songea Gédéon ; on dirait un piano ! »

Il se rappela qu’il avait des allumettes dans la poche de son gilet, et en alluma une.

Ce fut effectivement un piano qui s’offrit à son regard stupéfait ; un vaste et solennel instrument, encore tout humide d’avoir été exposé à la pluie. Gédéon laissa brûler, l’allumette jusqu’au bout, et puis, de nouveau, les ténèbres se refermèrent autour de son ahurissement. Alors, d’une main tremblante, il alluma sa lampe, et s’approcha. De près ou de loin, le doute n’était pas permis : l’objet était bien un piano. C’était bien un piano qui se tenait là, impudemment, dans un endroit où sa présence était un démenti à toutes les lois naturelles !

Gédéon ouvrit le clavier et frappa un accord. Aucun son ne troubla le silence de la chambre. « Serais-je malade ? » se dit le jeune homme, pendant que son cœur s’arrêtait de battre. Il s’as-