Page:Stevenson - Les Nouvelles Mille et Une Nuits, trad. Bentzon.djvu/107

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— Vous dites vrai, vous êtes dans les ténèbres, répliqua Mr. Malthus avec plus d’animation. Cher Monsieur, ce Club est le temple même de l’ivresse ; si ma santé affaiblie pouvait mieux supporter de pareilles excitations, je viendrais plus souvent, je vous le jure. Il faut tout le sentiment du devoir, qu’engendre une longue habitude de mauvaise santé et de régime rigoureux, pour me retenir d’abuser de ce qui est, je puis le dire, mon dernier plaisir. Je les ai épuisés tous, Monsieur, continua-t-il en posant sa main sur le bras de Geraldine, tous sans exception, et je vous déclare, sur mon honneur, qu’il n’y en a pas un dont le prix n’ait été grossièrement exagéré. On joue avec l’amour ; moi, je nie que l’amour soit une forte passion. La peur en est une plus forte ; c’est avec la peur qu’il faut badiner, si l’on veut goûter les joies intenses de la vie. Enviez-moi, enviez-moi, ajouta-t-il avec un ricanement ignoble, je suis poltron. »

Geraldine ne parvint à dissimuler son dégoût qu’avec peine, mais il prit sur soi et poursuivit l’interrogatoire.

« Comment cette excitation peut-elle être si habilement prolongée ? Il y a donc quelque élément d’incertitude ?