Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/163

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val révélait autant de tristesse que d’anxiété. Après être resté quelques instants debout devant la cheminée, le regard fixe, méditatif, il commença de se promener dans la chambre de long en large avec agitation, une de ses mains passée entre les revers de sa longue redingote bleue boutonnée jusqu’au col, l’autre enfoncée dans une de ses poches de derrière.

De temps à autre, Dagobert s’arrêtait brusquement, et, répondant tout haut à ses pensées intérieures, laissait çà et là échapper quelque exclamation de doute ou d’inquiétude ; puis, se tournant vers le trophée d’armes, il secouait tristement la tête en murmurant :

— C’est égal… cette crainte est folle… mais il est si extraordinaire depuis deux jours… Enfin… c’est plus prudent…

Et, se remettant à marcher, Dagobert disait après un nouveau et long silence :

— Oui, il faudra qu’il me dise… il m’inquiète trop… et ces pauvres petites !… Ah ! c’est à fendre le cœur.

Et Dagobert passait vivement sa moustache entre son pouce et son index, mouvement presque convulsif, symptôme évident chez lui d’une vive agitation.

Quelques minutes après, le soldat reprit, répondant toujours à ses pensées intérieures :