Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/214

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leur avoir ainsi laissé croire qu’elles étaient incapables de le consoler ; tantôt, il craignait de ne pas s’être montré assez tendre, assez expansif envers elles, de les avoir glacées par sa rudesse militaire ; tantôt enfin il se disait, avec un regret navrant, qu’ayant toujours vécu loin d’elles, il devait leur être presque étranger. En un mot, les suppositions les moins fondées se présentaient en foule à son esprit, et dès que de pareils germes de doute, de défiance ou de crainte sont jetés dans une affection, tôt ou tard ils se développent avec une ténacité funeste.

Pourtant, malgré cette froideur dont il souffrait tant, l’affection du maréchal pour ses filles était si profonde, que le chagrin de les quitter encore causait seul les hésitations qui désolaient sa vie, lutte incessante entre son amour paternel et un devoir qu’il regardait comme sacré.

Quant au fatal effet des calomnies assez habilement répandues sur le maréchal pour que des gens d’honneur, ses anciens compagnons d’armes, pussent y ajouter quelque créance, elles avaient été propagées par des amis de la princesse de Saint-Dizier avec une effrayante adresse : on aura plus tard et le sens et le but de ces bruits odieux, qui, joints à tant d’autres