Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/215

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

blessures vives faites à son cœur, comblaient l’exaspération du maréchal.

Emporté par la colère, par la surexcitation que lui causaient ces coups d’épingle incessants, comme il disait, choqué de quelques paroles de Dagobert, il l’avait rudoyé ; mais, après le départ du soldat, dans le silence de la réflexion, le maréchal, se rappelant l’expression convaincue, chaleureuse, du défenseur de ses filles, avait senti s’éveiller dans son esprit quelque doute sur la froideur qu’il leur reprochait, et, après avoir pris une résolution terrible, dans le cas où cette épreuve confirmerait ses doutes désolants, il entra, nous l’avons dit, chez ses filles.

Le bruit de sa discussion avec Dagobert avait été tel, que l’éclat de sa voix, traversant le salon, était confusément arrivé jusqu’aux oreilles des deux sœurs, réfugiées dans leur chambre à coucher. Aussi, à l’arrivée de leur père, leurs figures pâles trahissaient l’anxiété. À la vue du maréchal, dont les traits étaient également altérés, les deux jeunes filles se levèrent respectueusement, mais restèrent serrées l’une contre l’autre et toutes tremblantes.

Et pourtant ce n’était pas la colère, la dureté qui se lisaient sur la figure de leur père, c’était