Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/333

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un verrou et se mirent ainsi à l’abri d’une nouvelle attaque.

Morok, l’œil hagard, les dents convulsivement serrées, s’était rué sur Gabriel, les mains étendues en avant afin de le saisir à la gorge. Le missionnaire reçut vaillamment le choc ; ayant, d’un coup d’œil rapide, deviné le mouvement de son adversaire, à l’instant où celui-ci s’élança sur lui, il le saisit par les deux poignets… et, le contenant ainsi, les abaissa violemment d’une main vigoureuse.

Pendant une seconde, Morok et Gabriel restèrent muets, haletants, immobiles, se mesurant du regard ; puis le missionnaire, arc-bouté sur ses reins, le haut du corps renversé en arrière, tâcha de vaincre les efforts de l’hydrophobe, qui, par de violents soubresauts, tentait de lui échapper et de se jeter sur lui, la tête en avant, pour le déchirer.

Tout à coup le dompteur de bêtes sembla défaillir, ses genoux fléchirent ; sa tête livide, violacée, se pencha sur ses épaules ; ses yeux se fermèrent… Le missionnaire, pensant qu’une faiblesse passagère succédait à l’accès de rage de ce misérable, et qu’il allait tomber, cessa de le maintenir pour lui prêter secours… Se sentant libre, grâce à sa ruse, Morok se releva tout à coup pour se jeter avec rage sur Ga-