Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/390

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Livrés à nous-mêmes, libres tous deux… nous avons eu le courage de résister à tous les brûlants enivrements de la passion, afin d’acquérir le droit de nous y livrer plus tard sans regrets. Pendant ces jours où nos cœurs sont demeurés ouverts l’un à l’autre, nous y avons lu… tout lu… Aussi, Djalma… je crois en vous, et vous croyez en moi… Je trouve en vous ce que vous trouvez en moi, n’est-ce pas ?… toutes les garanties possibles, désirables, humaines, pour notre bonheur. Mais à cet amour, il manque une consécration… et aux yeux du monde où nous sommes appelés à vivre, il n’en est qu’une seule… une seule… le mariage, et il enchaîne la vie entière.

Djalma regarda la jeune fille avec surprise.

— Oui, la vie entière… et pourtant, quel est celui qui peut répondre à jamais des sentiments de toute sa vie ? reprit la jeune fille. Un Dieu… qui saurait l’avenir des cœurs, pourrait seul lier irrévocablement certains êtres… pour le bonheur ; mais, hélas ! aux yeux des créatures humaines, l’avenir est impénétrable ; aussi lorsqu’on ne peut répondre sûrement que de la sincérité d’un sentiment présent, accepter des liens indissolubles, n’est-ce pas commettre une action folle, égoïste, impie ?

— Cela est triste à penser, dit Djalma après