Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/436

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— Mais l’amour infortuné, l’amour misérable, l’amour trahi… verse des larmes de sang, reprit Faringhea avec un abattement douloureux.

— De quel amour trahi parles-tu ? dit Djalma surpris.

— Je parle de mon amour…, répondit le métis d’un air sombre.

— De ton amour ?… dit Djalma, de plus en plus surpris ; non que le métis, jeune encore et d’une figure d’une sombre beauté, lui parût incapable d’inspirer ou d’éprouver un sentiment tendre, mais parce qu’il n’avait pas cru, jusqu’alors, cet homme capable de ressentir un chagrin aussi poignant.

— Monseigneur, reprit le métis, vous m’aviez dit : « Le malheur t’a rendu méchant… sois heureux, et tu seras bon… » Dans ces paroles… j’avais vu un présage ; on aurait dit que pour entrer dans mon cœur un noble amour attendait que la haine, que la trahison fussent sorties de ce cœur… Alors, moi, à demi sauvage, j’ai trouvé une femme belle et jeune qui répondait à ma passion ; du moins, je l’ai cru ;… mais j’avais été traître envers vous, monseigneur, et, pour les traîtres, même repentants, il n’est jamais de bonheur ;… à mon tour, j’ai été trahi… indignement trahi.