Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/481

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faud, il se tue… Une femme comme Adrienne de Cardoville ne survit pas à l’infamie ou à la mort de son amant… elle se tue… ou elle meurt de désespoir… Ainsi, mort affreuse pour lui… mort affreuse pour elle… et, pour nous… ont dit ces hommes noirs… l’héritage que nous convoitons… »

— Mais pour toi !… si jeune, si belle, si pure… la mort est affreuse… et ces monstres triomphent ! s’écria Djalma. Ils auront dit vrai…

— Ils auront menti !… s’écria Adrienne ; notre mort sera céleste… enivrante… car ce poison est lent… et je t’adore… mon Djalma !…

En disant ces mots d’une voix basse et palpitante de passion, Adrienne, s’accoudant sur les genoux de Djalma, s’était approchée si près… de lui, qu’il sentit sur ses joues le souffle embrasé de la jeune fille…

À cette impression enivrante, aux jets de flamme humide que lui dardaient les grands yeux nageants d’Adrienne, dont les lèvres entr’ouvertes devenaient d’un pourpre de plus en plus éclatant, l’Indien tressaillit ;… une ardeur brûlante le dévora ;… son sang vierge, brassé par la jeunesse et par l’amour, bouillonna dans ses veines ;… il oublia tout, et son désespoir et une mort prochaine qui ne se manifestait encore