Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/88

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sillonné d’ombres dures et sans transparence.

On eût dit le modèle vivant d’un de ces moines ascétiques de l’école espagnole, sombres peintures où l’on aperçoit, sous quelque capuchon brun à demi rabattu, un crâne couleur de vieil ivoire, une pommette livide, un œil éteint au fond de son orbite, tandis que le reste du visage disparaît dans une pénombre obscure, à travers laquelle on distingue à peine une forme humaine, agenouillée et enveloppée d’un froc à ceinture de corde.

Cette ressemblance paraissait d’autant plus frappante que Rodin, descendant de chez lui à la hâte, n’avait pas quitté sa longue robe de chambre de laine noire ; de plus, étant encore très-sensible au froid, il avait jeté sur ses épaules un camail de drap noir à capuchon, afin de se préserver de la bise du nord.

Le père d’Aigrigny, ne se trouvant pas placé verticalement sous la lumière qui éclairait la cachette, restait dans la demi-teinte.

Au moment où nous présentons les deux jésuites au lecteur, Agricol venait de sortir de la chambre pour appeler Gabriel et l’amener auprès de son ancien patron.

Le père d’Aigrigny, regardant Rodin avec une angoisse à la fois profonde et courroucée, lui dit à voix basse :