Page:Sue - Martin l'enfant trouvé.djvu/156

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c’est pitié, — dit l’enfant à la jeune fille, — nous ne pouvons dormir dans l’étable, tant il gémit !

— Cours lui dire que je viens, — répondit Bruyère dont le visage s’attrista soudain ; puis s’adressant au vieillard, elle dit :

— Mon bon père, maître Chouart vous dira ce qu’il a fait… sa bonne expérience vous encouragera, suivez mes conseils… vous vous en trouverez bien et vous ne viendrez plus me demander de dire des paroles contre la terre nourricière… Mais je vais vous en parler qui peuvent changer votre terre épuisée en terre féconde ; ces paroles, les voici, bon père, retenez-les :

Cultivez peu… cultivez bien.

Année nouvelle, culture nouvelle.

À fréquent engrais, terre fertile.

Semez des prés… semez des prés

Sans pré, pas de bétail.

Sans bétail, pas d’engrais.

Sans engrais, pas de grain.

— Pratiquez ces préceptes, bon père, — ajouta Bruyère d’une voix douce et pénétrée, — vous ne maudirez plus… vous bénirez la terre du bon Dieu…

Après avoir dit ces mots, Bruyère alla baiser au front le petit enfant endormi dans les bras de sa mère, serra cordialement de sa petite main la main calleuse de maître Chouart, fit au vieillard un geste d’adieu rempli de grâce et de respect ; puis regagnant rapidement la métairie… elle disparut légère et charmante comme une fée…