Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/221

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très avancé, fut tuée pour avoir pleuré la mort de son fils. Tels étaient les actes du sénat. Le prince, de son côté, faisait périr Vescularius Atticus et Julius Marinus, deux de ses plus anciens amis, qui l’avaient suivi à Rhodes et ne le quittaient point à Caprée. Vescularius avait prêté son entremise au complot contre Libon. Séjan s’était servi de Marinus pour perdre Curtius Atticus. Aussi vit-on avec joie la délation s’emparer contre eux de leurs propres exemples. Dans le même temps mourut le pontife L. Piso, et, ce qui était rare dans une si haute fortune, sa mort fut naturelle. Jamais la servilité n’eut en lui un organe volontaire, et, toutes les fois que la nécessité lui imposa une opinion, il l’adoucit par de sages tempéraments. J’ai dit qu’il était fils d’un père honoré de la censure. Sa carrière s’étendit jusqu’à l’âge de quatre-vingts ans. Il avait mérité en Thrace les ornements du triomphe ; mais il acquit sa principale gloire comme préfet de Rome, par les ménagements admirables avec lesquels il usa d’un pouvoir dont la perpétuité récente pesait à des esprits neufs pour l’obéissance.

Le praefectus urbis
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Autrefois, quand les rois, et après eux les magistrats, s’éloignaient de la ville, afin qu’elle ne restât point livrée à l’anarchie, un homme, choisi pour le temps de leur absence, était chargé de rendre la justice et de pourvoir aux besoins imprévus. Romulus donna, dit-on, cette magistrature passagère à Denter Romulius, Tullus Hostilius à Marcius Numa, et Tarquin le Superbe à Sp. Lucrétius. Dans la suite, le choix appartint aux consuls. On conserve une image de cette institution, en nommant encore aujourd’hui, pour les féries latines, un préfet chargé des fonctions consulaires. Auguste, pendant les guerres civiles, avait confié à Cilnius Mécénas, chevalier romain, l’administration de Rome et de toute l’Italie. Devenu maître de l’empire, et considérant la grandeur de la population, la lenteur des secours qu’on trouve dans les lois, il chargea un consulaire de contenir les esclaves, et cette partie du peuple dont l’esprit remuant et audacieux ne connaît de frein que la crainte. Messala Corvinus reçut le premier ce pouvoir, qui lui fut retiré bientôt comme au-dessus de ses forces. Statilius Taurus, quoique d’un âge avancé, en soutint dignement le poids. Après lui, Pison l’exerça vingt ans avec un succès qui ne se démentit jamais. Le sénat lui décerna des funérailles publiques.

Un nouveau livre sibyllin
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Le tribun du peuple Quintilianus soumit ensuite à la délibération