Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/257

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consulat d’Aulus Vitellius et de L. Vipstanus, il fut question de compléter le sénat. Les principaux habitants de la Gaule chevelue13, qui depuis longtemps avaient obtenu des traités et le titre de citoyens, désiraient avoir dans Rome le droit de parvenir aux honneurs. Cette demande excita de vives discussions et fut débattue avec chaleur devant le prince. On soutenait "que l’Italie n’était pas assez épuisée pour ne pouvoir fournir un sénat à sa capitale. Les seuls enfants de Rome, avec les peuples de son sang, y suffisaient jadis ; et certes on n’avait pas à rougir de l’ancienne république : on citait encore les prodiges de gloire et de vertu qui, sous ces mœurs antiques, avaient illustré le caractère romain. Était-ce donc peu que des Vénètes et des Insubriens eussent fait irruption dans le sénat ; et fallait-il y faire entrer en quelque sorte la captivité elle-même avec cette foule d’étrangers ? A quels honneurs pourraient désormais prétendre ce qui restait de nobles et les sénateurs pauvres du Latium ? Ils allaient tout envahir, ces riches dont les aïeuls et les bisaïeuls, à la tête des nations ennemies, avaient massacré nos légions, assiégé le grand César auprès d’Alise. Ces injures étaient récentes : que serait-ce si on se rappelait le Capitole et la citadelle presque renversés par les mains de ces mêmes Gaulois ? Qu’ils jouissent, après cela, du nom de citoyens ; mais les décorations sénatoriales, mais les ornements des magistratures, qu’ils ne fussent pas ainsi prostitués."

13. On appelait ainsi la Gaule transalpine, à cause de l’usage où étaient les habitants de porter les cheveux longs. La Gaule cisalpine était nommée togata, parce qu’on y avait adopté la toge romaine.

Discours de Claude sur l’admission d’étrangers au sénat

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Le prince fut peu touché de ces raisons. Il y répondit sur-le-champ ; et, après avoir convoqué le sénat, il les combattit encore par ce discours14 : "Mes ancêtres, dont le