Page:Tailhade - Quelques fantômes de jadis (1920).djvu/42

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l’universalité des êtres un ténor contrefait, un poète scandaleux ? Aussi bien, est-ce peut-être une consolation, pour le commun des hommes, que cette indifférence de la Nature envers ses « fils aînés », l’incuriosité du Monde pour les avantages dont il comble ses favoris. Qui dat nivem sicut lanam, nebulas sicut cinerem spargit !

Et quand nous comptons les morts, quand nous pleurons ceux qui furent nos maîtres, ces plaintes ou ces révoltes n’ont pas d’écho dans l’Univers ! Hélas !

Combien sont partis, déjà, qui, sur la nef audacieuse du Mercure, s’embarquèrent, il y a trente ans, vers les cyprès d’Akademos, dans le sillage de Verlaine : Dubus, Fanier, Samain et, plus tard, Alfred Jarry, Marcel Schwob, hier encore le noble Pierre Quillard.

Les rameurs du golfe d’Otrante n’ont pas seuls mené des funérailles, perdu leurs frères d’armes aux escales du chemin. Elle nous emporte aussi vers les Mânes, la barque d’Eurydice ! Le crépuscule d’automne ouvre ses ailes grises et plane sur le flot. Voici que,