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moins mobiles et leur réunion en masse suffisent pour accélérer le mouvement par rapport à la couche plus épaissie et comme feutrée (10) qui, les entourant, forme une sorte de tube enroulé en cerceau et doué d’une certaine consistance ; il en résulte ainsi dans ces tubes circulaires un mouvement rapide, un vent, car c’est de cette façon qu’Anaximandre se représente également la production des vents dans notre atmosphère (2). Ce courant tend à s’échapper au dehors, et si le feutrage d’air présente une ouverture dirigée du côté de la terre, il s’y précipite avec violence et jaillit hors du canal sous forme de flammes qui nous apparaissent comme un astre.

Lorsque l’air, enfermé dans un nuage, parvient à le déchirer et à s’échapper brusquement, nous voyons un éclair (13). Un astre est donc « comme un éclair qui durerait toujours », sauf quand l’ouverture se ferme, ce qui produit les phases de la lune et les éclipses (2) (12). Le renouvellement de la matière du courant doit donc se faire constamment au moyen de l’air environnant l’anneau et par l’intermédiaire de l’enveloppe de ce dernier.

Dans la suite des temps, l’action des feux célestes a vaporisé la plus grande partie de la masse humide rejetée au centre du tourbillon ; notre terre s’est formée comme un dépôt à la suite de cette évaporation, tandis que les eaux de la mer arrivaient à leur nature actuelle (14).

Les premiers animaux se sont produits dans le sein des eaux, enveloppés d’une écorce épineuse ; avec le temps, ils ont trouvé une nouvelle demeure sur la terre, et dépouillés de leur écorce desséchée et fendue[1], ils se sont bientôt adaptés à de nouvelles conditions de vie. Il est notamment clair que l’homme dérive d’animaux différant de lui ; car, avec les difficultés de son éducation, il n’aurait pu subsister à l’origine (3) (17) (18).

C’est ainsi que l’univers est parvenu à l’état sous lequel il s’offre à nos yeux, mais cet état n’a rien de stable ; car tout ce qui est né doit périr et la chaleur céleste, due au mouvement, continue, comme elle a commencé, à dévorer et à dissiper le noyau central constitué par ce même mouvement. Ainsi, dans la suite des temps, les choses porteront justement la peine de leur isolement, le châtiment de leur iniquité (1) et reviendront à l’état de confusion originaire. Mais il y a aussi fin à toute destruction, et la même

  1. Cette métamorphose paraît suggérée par celle de certains insectes à larves aquatiques, les cousins, par exemple.