Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/138

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fournissent les sens ; il y a un abîme que l’on ne peut espérer combler, car ce sont là deux domaines essentiellement distincts, que Parménide assigne à la vérité et à l’opinion.

5. Telle est l’essence du système de l’Éléate ; il me semble, du moins, absolument illusoire de prétendre y découvrir autre chose que ces notions et concepts relativement simples et suffisamment élaborés avant lui. Sa puissance déductive n’en est pas moins remarquable pour être limitée dans un champ plus restreint, et l’influence considérable qu’il exerça sur le développement ultérieur de la pensée hellène n’en est pas moins justifiée.

Il ne semble pas avoir essayé de montrer comment l’illusion pouvait se produire ; il lui parut suffisant de la constater. C’est en cela qu’il est le père de l’idéalisme, quoique ses représentations aient toujours eu, ce semble, un caractère nettement concret.

C’est évidemment du moment où, la thèse de Parménide étant posée, l’antithèse fut soutenue contre elle, vers le milieu du ve siècle, que l’on peut considérer le concept de l’infini, non pas comme absolument élucidé, mais comme constitué intégralement. Il est donc tel chez Anaxagore et chez tous ceux qui désormais parlent de la matière comme infinie ; il est tel chez Mélissos qui, développant explicitement le germe idéaliste, essaie en vain de transformer ce concept, en rejetant comme illusoire tout ce qui est étendu, et en appliquant la qualification d’« infini » à l’Être qu’il cherche à définir par la seule raison ; il est tel enfin plus tard chez les atomistes qui introduisent la notion du vide absolu.

Quant à l’école de Pythagore, elle resta fidèle à la doctrine de l’infinitude ; Philolaos, en affirmant l’immobilité du ciel et le mouvement de la terre autour du centre du monde, résolut le problème trouvé impossible par les Eléates, mais qui n’avait nullement pour lui la même importance) puisqu’en tant que pythagorien, il suivait une doctrine dualistique. C’est d’autre part à Archytas que l’on doit le célèbre argument de L’homme à l’extrémité du ciel des fixes et étendant la main au dehors (Simplic. in physic., 108 a). Mais de son temps la doctrine du vide a été propagée, et Archytas ne se prononce pas entre L’existence d’une matière extérieure ou simplement celle d’un lieu.

C’est en cet état que la question arrive devant Aristote, qui, rejetant l’infinitude de la matière, rejetant également le vide absolu, revint, au point de vue concret, à la conception de Parmé-