Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/227

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ces couples de contraires, et, par une extension que son précurseur n’aurait sans doute pas contredite, il entend que ce « tempérament » des contraires détermine l’homme tout entier, aussi bien au moral qu’au physique.

Ainsi Parménide, pour les sensations, n’a point suivi les expositions d’Alcméon; il l’a singulièrement dépassé par la portée de ses affirmations, mais il ne se trouve nullement en opposition avec lui. Loin de là, ils semblent bien appartenir à une même école, et, si peut-être il y avait entre leurs écrits des contradictions de détail, on doit probablement les imputer au peu de précision des concepts et de la langue de leur temps.

Si par exemple on nous dit (Aétius, IV, 5) que Parménide plaçait le principat (to yjy^ovixcv) dans la poitrine, Empédocle dans le sang, Alcméon dans le cerveau, comme il est certain qu’aucun d’eux n’a employé l’expression dont se sert le doxographe, et que ces prétendues opinions ont été déduites de passages qui avaient un sens beaucoup plus vague, il est impossible de conclure à une contradiction voulue.

9. Mais il est temps d’arriver au sujet spécial traité, de part et d’autre, avec assez de détails pour qu’il eût été possible d’en conclure si, de fait, Parménide avait suivi Alcméon au moins dans certaines parties de son ouvrage. Ce sujet, c’est celui de la génération humaine et en particulier de la cause qui détermine le sexe dans l’embryon.

Censorinus, qui est la source à consulter dans l’objet, constate l’accord de Parménide et d’Alcméon sur deux points capitaux : l’un que la femme donne une semence qui contribue, comme celle de l’homme, à la formation de l’embryon ; l’autre que le sexe dépend des conditions du mélange des deux semences. A ne comparer que les deux données de Censorinus sur ce second point, on pourrait même croire que l’accord était complet ; mais il n’en est rien, quoiqu’on puisse ramener à un sens très voisin de l’opinion d’Alcméon les vers latins traduits de Parménide que Gaelius Aurelianus a conservés (1). En effet, Censorinus lui-même, Aétius

(*)

Femina virque simul Veneris quum germina miscent
Unius in formam diverso ex sanguine, virtus
Temperiem servans bene condita corpora fingit ;
At si virtutes permixto sanguine pugnent
Nec faciant unam, permixto in corpore dirae
Nascentein gemino vexabunt semine sexum.