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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.

couronne, ignée d’après Aétius. Il ne me parait pas douteux qu’il ne faille y reconnaître la voie lactée ; mais ce n’est point une couronne de feu pur ; car, si le feu semble former une enceinte continue, il n’apparaît en fait que par expiration, et la nuance blanchâtre de la couronne est précisément due au mélange des deux éléments (13). Au reste, nous avons encore un vers de Parménide ; avec la leçon de Diels,

126. Αί γἁρ στεινότεραι πλῆντο πυρὁς ἀκρήτοιο,

il correspond exactement à la conception d’Anaximandre, le feu à l’intérieur d’une couronne creuse.

De même, la dernière couronne qui enveloppe le noyau central et qu’Aétius dit également ignée, n’est certainement pas non plus de feu pur ; cette couronne ne peut être que notre atmosphère, ou du moins sa partie lumineuse (éclairée), puisque Parménide compte l’air obscur comme faisant partie de l’élément dense.

Les couronnes intermédiaires, mixtes des deux éléments, comme les autres, mais où la lumière a moins de prédominance, et entre lesquelles, d’après le vers 127, on pourrait même supposer des couronnes entièrement obscures, doivent correspondre, à partir de la terre, aux orbites de la lune, du soleil et des cinq planètes ; car, quoique Parménide semble n’avoir parlé expressément que de Vénus, les autres planètes qu’Anaximandre n’avait pas distinguées des étoiles devaient sans doute être également connues des premiers pythagoriens.


11. Si l’on fait abstraction de la conception spéciale de l’air lumineux comme igné, on peut dire, en somme, que la représentation que Parménide se fait du monde dérive de celle d’Anaximandre, modifiée surtout en raison du progrès scientifique.

Ainsi ce progrès a fait multiplier les trois anneaux du Milésien ; il a dû également amener une interversion dans leur ordre, puisque Anaximandre regardait la voie lactée comme étant plus voisine de la terre que la lune et le soleil. À la vérité, d’après Aétius (11), Parménide aurait conservé le même ordre ; il aurait placé, au plus loin de la terre, Vénus dans l’éther, au-dessous le soleil, puis les astres dans la région ignée qu’il appelait Ouranos ; mais cet ordre a été conclu faussement d’une interprétation rigoureuse donnée à tort aux termes d’Éther et d’Ouranos.

Le progrès de la science a consisté ici dans une réflexion