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CHAPITRE XIII. — EMPÉDOCLE d'âGRIGENTE (f). 331

Un homme sage ne pensera jamais ainsi, il ne croira pas | que, pendant que les mortels vivent ce qu'ils appellent leur vie, | ils existent, jouissant des biens, souffrant des maux, | mais qu'avant leur formation ou après leur dissolution ils ne sont rien. |

420 1 Allons, considère ce qu'ont attesté mes premières paroles, vois | s'il y a, dans ce que j'ai dit, quelque forme omise : | le soleil, brillant à voir, source de toute chaleur, | l'éther épandu, que bai- gnent les blanches lueurs, | la pluie, sombre et froide entre toutes choses, |125| la terre, d'où provient tout ce qui est solide et pesant. ] Dans la Haine, ils sont tous isolés et défigurés, | mais l'Amour les réunit par un désir réciproque. | C'est d'eux que se forme tout ce qui a été, est ou sera jamais, | que poussent les arbres, les hommes et les femmes, |130] les bêtes, les oiseaux, les poissons que l'eau nourrit, | et les dieux à la longue vie, à qui appartiennent les suprêmes honneurs. | Tous ces êtres sont ces mêmes choses, qui circulent au travers les unes des autres, | apparaissent sous divers aspects, que la dissociation fait varier. |

De même les peintres travaillent leurs tableaux destinés aux temples; |135| ces hommes profondément instruits dans leur art ingénieux, | prennent les couleurs aux nuances variées; | ils les mélangent harmonieusement, plus des unes, moins des autres, | et en font des figures imitant toutes les formes, | arbres, hommes et femmes, |140| bêtes, oiseaux, poissons que l'eau nourrit, | dieux à la longue vie, à qui appartiennent les suprêmes honneurs. | Ainsi donc ne laisse pas tromper ton esprit et ne va pas croire qu'il y ait ailleurs | quelque autre source pour les choses mortelles, si innombrables qu'en soient les espèces ; | tiens pour assurée la connaissance que t'enseigne la parole divine. |

145| Car elles ont été auparavant, elles seront plus tard, et je ne crois pas | qu'aucune des deux manque jamais dans le temps infini. |

Tour à tour ils prédominent dans le cours d'un cycle, | se per- dent l'un dans l'autre ou grandissent suivant le retour fatal. | Ils restent les mêmes, mais circulant au travers les uns des autres, |150| forment les hommes et les diverses tribus des bêtes. | Tantôt l'Amitié les réunit en une seule ordonnance, | tantôt ils se séparent, entraînés par la Haine, | jusqu'à ce que toute union soit absolument détruite. | Ainsi, en tant que l'un naît de plusieurs, |155| et qu'à leur tour, ceux-ci se constituent par sa division, | en ce sens l'un et les autres commencent et ne

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