Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/94

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur laquelle nous ne savons que très peu de chose. Élien (iiie siècle de notre ère) nous raconte seulement qu’il conduisit une colonie à Apollonie de Thrace, et Favorinus (iie siècle) qu’il établit un gnomon à Lacédémone. La première donnée n’est nullement garantie contre la possibilité d’une confusion sur un nom qui se perpétua à Milet et pouvait y être déjà ancien ; la seconde est contredite par un écrivain antérieur, Pline, qui attribue formellement à Anaximène la construction du gnomon de Lacédémone.

2. Il n’est pas inutile d’entrer à ce propos dans quelques détails sur la gnomonique ancienne. L’instrument qui a donné son nom à cette branche de la science était tout simplement une tige verticale dressée sur un plan horizontal. L’observation de l’ombre minima de cette tige sur ce plan permettait de déterminer les points cardinaux, le midi vrai, et l’époque des solstices, dont celui d’été servait, chez les Grecs, à déterminer le commencement de l’année. Avec des connaissances géométriques élémentaires, le gnomon suffit également pour déterminer les équinoxes, l’obliquité de l’écliptique et la hauteur du pôle pour l’endroit où il est élevé ; il servit donc plus tard à prouver la sphéricité de la terre.

Cet instrument était certainement connu des Grecs d’Ionie, dès avant Anaximandre. Sans parler de Thalès, une tradition assez constante attribue à Phérécyde de Syros la construction du gnomon de Délos. D’autre part, Hérodote déclare formellement que le gnomon, le polos et la division du jour en douze parties ont été empruntés par les Grecs aux Babyloniens.

Le polos, essentiellement différent du gnomon, était une horloge solaire. Mais ce cadran primitif ne ressemblait en rien aux nôtres. C’était une demi-sphère concave ayant pour centre l’extrémité d’un style ; chaque jour, l’ombre de cette extrémité décrivait un arc de cercle parallèle à l’équateur, et il était, facile de diviser ces parallèles, supposés complétés, en douze ou vingt-quatre parties égales. La construction de pareils cadrans peut présenter quelques difficultés pratiques ; mais elle ne suppose, pas plus que leur invention, aucune théorie mathématique ; il suffisait, pour les imaginer, d’avoir une idée nette du mouvement diurne apparent du soleil.

On possède de ces cadrans sphériques[1], qui lurent les seuls

  1. Il en existe notamment deux au Musée du Louvre.