Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/222

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« Excusez-moi, docteur, en vérité tout cela ne mène à rien : voilà la troisième fois que vous me faites la même question. »

Le médecin ne s’offensa pas.

« C’est une irritabilité maladive, fit-il remarquer à la princesse lorsque Kitty fut sortie. Au reste, j’avais fini. »

Et le docteur expliqua l’état de la jeune fille à sa mère, comme à une personne exceptionnellement intelligente, en lui donnant, pour conclure, les recommandations les plus précises sur la façon de boire ces eaux dont le mérite à ses yeux était d’être inutiles. Sur la question : fallait-il voyager, le docteur réfléchit profondément, et le résultat de ses réflexions fut qu’on pouvait voyager, à condition de ne pas se fier aux charlatans et de ne pas suivre d’autres prescriptions que les siennes.

Le docteur parti, on se trouva soulagé comme s’il fût arrivé quelque chose d’heureux. La mère revint auprès de sa fille toute remontée, et Kitty prit également un air rasséréné. Il lui arrivait souvent maintenant de dissimuler ce qu’elle ressentait.

« Vraiment, maman, je me porte bien. Mais, si vous le désirez, partons », dit-elle, et, pour tâcher de prouver l’intérêt qu’elle prenait au voyage, elle parla de leurs préparatifs de départ.