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— Pourquoi le trèfle n’a-t-il point été criblé ? demanda Levine.

— Ça ne fait rien, ça s’arrangera », répondit Wassili, prenant des semences et les triturant dans ses mains.

Wassili n’était pas le coupable, mais la contrariété n’en était pas moins vive pour le maître. Il descendit de cheval, prit le semoir des mains de Wassili, et se mit à semer lui-même.

« Où t’es-tu arrêté ? »

Wassili indiqua l’endroit du pied, et Levine continua à semer du mieux qu’il put ; mais la terre était semblable à un marais, et au bout de quelque temps il s’arrêta, tout en nage, pour rendre le semoir à l’ouvrier.

« Le printemps est beau, dit Wassili, c’est un printemps que les anciens n’oublieront pas ; chez nous, notre vieux a aussi semé du froment. Il prétend qu’on ne le distingue pas du seigle.

— Y a-t-il longtemps qu’on sème du froment chez vous ?

— Mais c’est vous-même qui nous avez appris à en semer ; l’an dernier vous m’en avez donné deux mesures.

— Eh bien, fais attention, dit Levine retournant à son cheval, surveille Mishka, et si la semence lève bien, tu auras cinquante kopecks par dessiatine.

— Nous vous remercions humblement ; nous serions contents, même sans cela. »

Levine remonta à cheval et alla visiter son champ