Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 1.djvu/343

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garder son calme, — et se fit conduire en voiture aux écuries. On voyait de là un océan d’équipages de toutes sortes, des piétons, des soldats, et toutes les tribunes chargées de spectateurs. — La seconde course devait en effet avoir lieu, car il entendit un coup de cloche. Il avait rencontré près de l’écurie l’alezan de Mahotine, Gladiator, qu’on menait couvert d’une housse orange et bleue avec d’énormes oreillères.

« Où est Cord ? demanda-t-il au palefrenier.

— À l’écurie, — on selle. »

Frou-frou était toute sellée dans sa stalle ouverte, et on allait la faire sortir.

« Je ne suis pas en retard ?

All right, all right, dit l’Anglais, ne vous inquiétez de rien. »

Wronsky jeta un dernier regard sur les belles formes de sa jument, et la quitta à regret ; — elle tremblait de tous ses membres. Le moment était propice pour s’approcher des tribunes sans être remarqué ; la course de deux verstes s’achevait, et tous les yeux étaient fixés sur un chevalier-garde et un hussard derrière lui, fouettant désespérément leurs chevaux en approchant du but. On affluait vers ce point de tous côtés, et un groupe de soldats et d’officiers de la garde saluaient avec des cris de joie le triomphe de leur officier et de leur camarade.

Wronsky se mêla à la foule au moment où la cloche annonçait la fin de la course, tandis que le vainqueur, couvert de boue, s’affaissait sur sa selle et laissait