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posait de tenter étaient illusoires ; pendant les tristes heures qu’il venait de traverser, il n’avait pas songé un instant à chercher un point d’appui dans la religion, mais, sitôt qu’il sentit celle-ci d’accord avec sa détermination, cette sanction lui devint un apaisement. Il fut soulagé de penser que personne n’aurait le droit de lui reprocher d’avoir, dans une crise aussi grave de sa vie, agi en opposition avec la foi dont il portait si haut le drapeau au milieu de l’indifférence générale.

Il finit même, en y réfléchissant, par se dire qu’aucune raison ne s’opposait à ce que ses rapports avec sa femme restassent, à peu de chose près, ce qu’ils avaient été dans les derniers temps. Sans doute il ne pouvait plus l’estimer ; mais bouleverser sa vie entière, souffrir personnellement parce qu’elle était infidèle, il n’en voyait pas le motif.

« Et le temps viendra, pensa-t-il, ce temps qui résout tant de difficultés, où ces rapports se rétabliront comme par le passé ; il faut qu’elle soit malheureuse, mais moi, qui ne suis pas coupable, je ne dois pas souffrir. »


CHAPITRE XIV


En approchant de Pétersbourg, Alexis Alexandrovitch avait complètement arrêté la ligne de conduite qu’il devait tenir envers sa femme, et même composé mentalement la lettre qu’il lui écrirait. Il