Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 2.djvu/133

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— Je vous en prie, n’embrouillez pas les choses ! Peu importe ce que j’écris, mais il est de fait que j’aime les mollusques.

— Cela ne vous empêcherait pas d’aimer une femme.

— Non, c’est ma femme qui s’opposerait à mon amour pour les mollusques.

— Pourquoi cela ?

— Vous le verrez bien. Vous aimez en ce moment la chasse, l’agronomie ; eh bien, attendez.

— J’ai rencontré Archip aujourd’hui, dit Tchirikof ; il prétend qu’on trouve à Prudnov des quantités d’élans, même des ours.

— Vous les chasserez sans moi.

— Tu vois bien, dit Serge Ivanitch. Quant à la chasse à l’ours, tu peux bien lui dire adieu : ta femme ne te la permettra plus. »

Levine sourit. L’idée que sa femme lui défendrait la chasse lui parut si charmante qu’il aurait volontiers renoncé à jamais au plaisir de rencontrer un ours.

« L’usage de prendre congé de sa vie de garçon n’est pas vide de sens, dit Serge Ivanitch. Quelque heureux qu’on se sente, on regrette toujours sa liberté.

— Avouez que, semblable au fiancé de Gogol, on éprouve l’envie de sauter par la fenêtre.

— Certainement, mais il ne l’avouera pas, dit Katavasof avec un gros rire.

— La fenêtre est ouverte… partons pour Tver ! On peut trouver l’ourse dans sa tanière. Vrai, nous