Page:Tolstoï - Anna Karénine, 1910, tome 2.djvu/403

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— Tu n’iras pas au concert ?

— Que veux-tu que j’y aille faire tout seul ?

— Je t’en prie, vas-y, on donne deux œuvres nouvelles qui t’intéresseront.

— En tout cas, je rentrerai avant dîner pour te voir.

— Mets ta redingote pour pouvoir passer chez les Bohl.

— Est-ce bien nécessaire ?

— Certainement, le comte est venu lui-même chez nous.

— J’ai tellement perdu l’habitude des visites que je me sens tout honteux ; il me semble toujours qu’on va me demander de quel droit un étranger comme moi, qui ne vient pas pour affaires, s’introduit dans une maison. »

Kitty se mit à rire.

« Tu faisais bien des visites quand tu étais garçon ?

— C’est vrai, mais ma confusion était la même » ; et, baisant la main de sa femme, il allait sortir lorsque celle-ci l’arrêta :

« Kostia, sais-tu qu’il ne me reste plus que cinquante roubles ? Je ne fais pas de dépenses inutiles, il me semble, ajouta-t-elle envoyant le visage de son mari se rembrunir ; cependant l’argent disparaît si vite qu’il faut que notre organisation pèche de quelque côté.

— Nullement, répondit Levine avec une petite toux qu’elle savait être un signe de contrariété. J’entrerai à la Banque. D’ailleurs j’ai écrit à l’in-